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Faim, exploitation, gaspillage alimentaire : que pouvons-nous y faire ?

18. février 2022

Près de 800 millions de personnes dans le monde souffrent de sous-alimentation. Pourquoi ? Et que pouvons-nous faire, la société et moi – en tant qu’individu -, pour améliorer leur situation ?  

S’appuyant sur l’exemple de la République Démocratique du Congo, Ulrich Bachmann, directeur de Connexio hope et de Connexio develop, expose dans cet entretien la multiplicité des causes de la faim et ce qui serait nécessaire pour améliorer la situation des personnes concernées.

Ueli, en République Démocratique du Congo, près d’une personne sur trois est menacée par la famine ; certaines ne mangent qu’une fois par jour, d’autres ne reçoivent pas tous les nutriments nécessaires. Que ressens-tu en entendant cela ?

Je trouve que c’est dramatique et scandaleux. En tant que société et qu’Église, nous avons vraiment pour mandat de faire tout notre possible pour que cela puisse changer. Ce d’autant plus que l’on sait que chez nous, environ un tiers des aliments sont perdus lors des récoltes et du stockage et à cause du gaspillage alimentaire.

Au Congo, on trouve de bonnes terres arables, où poussent entre autres du manioc, des bananes et des avocats. Le pays est aussi riche en matières premières. Pourquoi les gens ont-ils tout de même faim ?

C’est une bonne question. Le Congo est souvent appelé le grenier de l’Afrique. Mais malheureusement et paradoxalement, c’est justement la population rurale qui produit la nourriture qui n’a souvent pas suffisamment à manger. Beaucoup de familles peuvent tout juste cultiver assez pour survivre. Il suffit alors que quelqu’un ait besoin de médicaments ou qu’il faille payer l’écolage des enfants, pour que ces familles doivent vendre leur production à perte. En raison des mauvaises infrastructures, il n’y a que peu de marchés de gros. Beaucoup de gens ne peuvent pas constituer de réserves ou ne disposent pas de semences solides adaptées aux conditions locales. Et la pandémie a encore compliqué les choses. Sans compter les nombreux conflits armés qui obligent les familles à fuir ou les empêchent de cultiver leurs champs à cause de l’insécurité. Les richesses minières ont été exploitées depuis l’époque coloniale ; aujourd’hui encore, des gens sur place et à l’étranger s’enrichissent grâce à ces matières premières, tandis que les populations locales n’en tirent pratiquement aucun profit.

Qui devrait faire quoi pour que les habitants du Congo aillent mieux ?

Il faudrait des politiciens qui privilégient le bien-être de la population et soient conscients de leur responsabilité envers le pays. Et aussi que la population civile ait de l’influence sur le processus législatif et puisse revendiquer ses droits. À cela s’ajoutent des relations commerciales équitables ; il faut que nous, en tant que partenaires, signions des contrats contribuant à ce que toute la population en bénéficie et pas seulement une élite riche. Les produits d’exportation doivent être vendus à des prix corrects, et les matières premières être transformées dans le pays, pour que la création de valeur ait lieu sur place. Enfin, il est indispensable de trouver des solutions aux incessants conflits armés. Plus généralement : pour pouvoir instaurer une société permettant à chaque personne d’avoir accès à ce dont elle a besoin et de réduire la pauvreté, il faut la paix et la justice. Il faut un environnement politique et économique qui offre aux habitants la sécurité nécessaire pour bâtir leur existence.

Quel pourrait être le rôle de l’Église ?

Au Congo, l’Église est déjà très active. Elle gère des hôpitaux et des écoles, elle donne de l’espoir et un sentiment de sécurité aux gens. Ses membres partagent leurs maigres ressources avec ceux qui en ont le plus besoin. L’Église a de l’influence et peut donner une voix à ceux qui jusqu’ici n’étaient pas entendus. Bien sûr, il lui arrive parfois aussi d’être contrainte de conclure des alliances, de se faire manipuler ou de devoir se taire, par exemple dans le cas d’élections contestées.

Finalement : que puis-je faire en tant qu’individu ici et maintenant ?

Tout d’abord, attirer l’attention sur la situation des personnes en détresse et sur les injustices. Puis, bien sûr aussi, s’engager politiquement. Lors des votations, s’investir pour que la Suisse établisse des relations commerciales équitables et éthiquement responsables. Et enfin : je peux faire attention à ma façon de vivre, à ce que je consomme. Les personnes qui produisent ce que j’achète sont-elles correctement traitées et rétribuées ?

Texte: Nicole Gutknecht // Photo: Ulrich Bachmann


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Connexio develop soutient un nouveau projet de l’Église Méthodiste du Congo oriental qui doit permettre à quelque 70 jeunes de la province du Maniema de subvenir à leurs besoins en se lançant dans l’agriculture. À Kamina, dans la province du Haut-Lomami, l’Église contribue à l’alimentation équilibrée d’environ 200 enfants présentant des symptômes de sous-alimentation. L’Église Méthodiste du Congo et Connexio develop sont reconnaissants pour toute contribution à la lutte contre la faim et la pauvreté.

Connexio develop : IBAN CH44 0900 0000 1574 7157 9 pour : Développement rural RD Congo ou pour : Programme alimentaire Kamina